Maurice Gamelin
Général malade aux lourdes reponsabilités
Un militaire prometteur
Né le 20 novembre 1872, Maurice Gamelin est issu d’une famille modeste, pour ne pas dire très modeste. Dès son jeune âge, l’enfant qu’il est encore s’intéresse déjà beaucoup aux questions militaires. Ainsi et après un brillant parcours scolaire, il intègre la prestigieuse école militaire de Saint-Cyr, où il en sortira major de promotion en 1893.
Très cultivé, travailleur tout en étant modeste et à l’écoute, il sort deuxième au concours d’entrée de l’Ecole supérieure de guerre, dans laquelle il se démarquera par ses études de tactiques militaires. Incontestablement, le jeune homme présente toutes les qualités pour réussir une brillante carrière dans l’armée.
La première guerre mondiale
Et puis la Première Guerre mondiale éclate. Maurice Gamelin est alors promu lieutenant-colonel au cours du mois de novembre 1914, puis colonel en avril 1916. L’homme fait l’admiration de ses supérieurs mais aussi des troupes qu’il dirige, il est alors nommé général au cours du mois de décembre de la même année.
Prenant le commandement de la 5ème division d’infanterie qu’il conduit à la victoire, le général se démarque des autres en se montrant soucieux d’économiser la vie de ses hommes, à l’inverse de certains de ses compères qui trop longtemps, se sont obstiné dans de nombreuses charges suicidaires.
Maurice Gamelin, homme brillant mais malade
Pendant l’entre-deux-guerres, Gamelin continue de gravir les échelons, notamment grâce à plusieurs missions effectuées à l’étranger. Mais en 1930, il contracte une neurosyphilis, à savoir, une infection du système nerveux central. Une maladie forte, pouvant entraîner de réelles défaillances physiques mais aussi mentales. Soigné à base de mercure et d’arsenic, sans surprise, l’état du général ne s’améliore pas et aucun traitement ne sera trouvé par la suite.
Dès lors, à partir de 1935, il ne fait plus aucun doute que ses facultés, justement physiques et intellectuelles, sont atteintes. Cependant, elles demeureront cachées du grand public alors même que la pathologie poursuit sa progression.
Garant de la défense nationale
Le désormais expérimenté Gamelin succède, en 1931, au général Weygand comme chef d’état-major général. A partir de 1935, il cumule les fonctions de chef des forces terrestres françaises et d’inspecteur général de l’armée. Jamais depuis Joffre, un général n’avait obtenu autant de responsabilités.
Par un nouveau décret publié le 21 janvier 1938, et ayant le soutien du Président du Conseil Edouard Daladier, Maurice Gamelin est nommé chef d’état-major de la défense nationale. L’homme politique fait pourtant partie des rares informés de sa maladie, mais aucun médecin militaire n’ose évoquer le sujet de sa maladie qui pourtant, évolue fortement et Daladier fait semblant de ne pas comprendre.
Ainsi, le chef militaire se voit pour responsabilité de coordonner les trois armées françaises ; terre, mer et air. Alors que les tensions avec l’Allemagne nazie sont extrêmes et qu’une nouvelle guerre menace, Maurice Gamelin jouera indéniablement un rôle déterminant dans la préparation militaire et la défense du pays face à cette prochaine guerre.
De la bataille de France à la débâcle
Dès le début de l’année 1940, plusieurs officiers de l’armée, de même que plusieurs hommes politiques, se plaignent de Gamelin. Selon eux, il serait impossible d’obtenir une réponse nette et précise du général. De plus, ils lui reconnaissent un manque de charisme, l’empêchant de mener à bien les hommes. Pour cause, la maladie fait malheureusement son chemin et plus que jamais, l’homme souffre de fortes carences mentales, engendrant un réel manque d’analyse. Ainsi donc et en effet, le général est incapable de prendre une décision claire et tranchée. Il se perd dans les détails des événements, se montre contradictoire et marque aussi par une absence de pensée stratégique. Il est dans le déni de toute réalité, ses choix et ses ordres sont désastreux pour l’avenir de la France.
Le 1er mai 1940, Maurice Gamelin est informé par les renseignements militaires que l’armée allemande attaquera entre le 8 et le 10 de ce même mois sur l’ensemble du front avec un effort principal du côté de Sedan. L’homme reste dubitatif, il s’agit selon lui d’une simple tentative de diversion. Il n’en croit rien. Un peu plus tard, un rapport de l’aviation de reconnaissance l’informe qu’une impressionnante progression de Panzers est en cours dans les Ardennes. Mais contre toute attente, le général s’en tient à son idée initiale : l’Allemagne attaquera par le Nord de la Belgique.
Persuadé que la forêt des Ardennes est impénétrable, il délaisse la zone de Sedan où finalement plus tard, 50 divisions allemandes feront face à une dizaine de divisions françaises nettement sous-équipées. Toujours au cours du mois de mai 1940 et plutôt que de soutenir les faibles forces du général Giraud déployées sur la Meuse, il engage la très puissante 7ème armée française au secours de la Hollande qui pourtant, de tout point de vue, est déjà perdue. A ce titre, le maréchal Montgomery écrira dans ses mémoires : « Son mouvement en avant jusqu’en Hollande fut une des plus graves erreurs de Gamelin, car il rompit l’équilibre de tout le front Nord-Est ».
Autre choix, il utilise les six divisions blindées, dont celle du général de Gaulle, dans des contre-attaques mal coordonnées et sans soutien aérien, à l’extrême inverse des Allemands. Alors qu’il n’a aucune connaissance des fortifications belges, il fait entrer son armée en Belgique, où il essuie alors plusieurs oppositions internes. L’armée belge n’est pas assez puissance pour retarder, un temps nécessaire l’armée allemande, et ses fortifications, si elles existent, sont dérisoires. Oubliant les leçons de 1918, la réserve stratégique est dispersée, conduisant la France à de terribles malheurs.
Alors que la bataille fait rage, Maurice Gamelin n’est plus qu’un bureaucrate. Ses contacts privilégiés sont avec les hommes politiques plutôt qu’avec les hommes du front. Indiscutablement en retard sur son temps, il jure fidélité au téléphone filaire, pourtant régulièrement coupé par les attaques aériennes ennemies et laisse de côté, l’efficace radio de campagne. Pire, quand les liaisons téléphoniques ne sont plus possibles, il utilise des coursiers, une méthode d’un autre temps. A l’inverse des Allemands, très judicieusement équipés en matière de communications, ses ordres prennent de nombreuses heures à parvenir au front, jusqu’à 24 heures pour un ordre de contre-attaque, perdu d’avance.
L’armée française est à la déroute, les soldats pourtant pleins de bonne volonté, se perdent ou sont même abandonnés par leur commandement. Le conflit armé vient tout juste de commencer, il est pourtant déjà trop tard, la bataille de France est un désastre, bientôt sonnera l’heure de la débâcle.
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Tableau des sources et des références
Mai – Juin 1940 : les causes de la défaite – Dominique Lormier – Alisio Histoire