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Histoire et Mémoire de la Seconde Guerre mondiale

Poste de commandement des batteries de Crisbecq

7.07.21

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Le poste de commandement des batteries de Crisbecq (Saint-Marcouf)

Le poste de commandement des batteries de Crisbecq est une fortification allemande située face à la célèbre plage d’Utah Beach, dans le petit village normand de Saint-Marcouf, à quelques minutes de Sainte-Mère-Église. Plus gros bunker du Mur de l’Atlantique dans ce secteur du Débarquement allié, il est resté à l’abandon durant près de 70 ans, pour finalement devenir – aujourd’hui – un magnifique musée. Du côté des lignes allemandes, c’est ici que tout à commencé, au petit matin du 6 juin 1944.

Poste de commandement des batteries de Crisbecq - Vestiges du Débarquement de Normandie à Utah Beach

Le poste de commandement des batteries de Crisbecq et son poste d’observation.

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La batterie de Crisbecq et le Mur de l’Atlantique

Après la rupture du pacte germano-soviétique, les Allemands mobilisent énormément de moyens humains et matériels sur le front de l’Est. Pour éviter l’ouverture d’un second front Allié à l’Ouest, ils décident de la construction du Mur de l’Atlantique ; Un ensemble de fortifications défensives placées tout le long du littoral ouest européen – de l’extrême nord de la Norvège, jusqu’aux Pyrénées Atlantiques françaises, sensées remettre à la mer toutes tentatives de débarquement.

Batteries de Crisbecq - Saint-Marcouf - Vestiges du Débarquement de Normandie à Utah Beach

La batterie de Crisbecq (Saint-Marcouf) et au premier plan, le poste de commandement.

Décidée par Hitler, la construction du Mur de l’Atlantique est la plus grande entreprise de génie militaire depuis la création de la Muraille de Chine. Plan absolument vertigineux, celui-ci doit voir – rien qu’en France – la construction de milliers de casemates, de batteries d’artillerie tous les deux kilomètres, des pièges sur chacune des plages, des postes de commandement tous les 20 kilomètres en plus des bases de sous-marins U-Boots présentes à Brest, Lorient, Saint-Nazaire, La Pallice et Bordeaux. Pour être clair, aucun angle mort n’est permis.

Ainsi en France, 4 400 kilomètres de côtes sont mise en défense, nécessitant 17 millions de mètres cube de béton (l’équivalent de 65 centrales nucléaires selon le magazine Géo), notamment pour la construction de 8 000 bunkers, bâtit à partir de 700 plans différents.

La batterie de Crisbecq est l’une des plus puissantes du Mur de l’Atlantique. Celle-ci est équipée de 3 canons de 210mm d’une portée de 30 kilomètres, de 6 canons antiaériens – dont l’une des tourelles est placée au sommet du poste de commandement, d’environ 70 mitrailleuses, tout en étant entourée d’une clôture de barbelés et d’un champ de mines.

Entrée en construction à l’été 1941, elle est presque continuellement améliorée pour faire face à la potentielle arrivée des Alliés. Au début, elle était placée sous la responsabilité de l’armée de terre allemande, avant de finalement passer aux mains de la Marine.

A l’aube de l’année 1944, le commandement de la batterie est assuré par Walter Ohmsen. Sous ses ordres, 297 marins. L’ensemble de cette position défensive est aussi protégée par une centaine d’hommes de l’infanterie stationnés à Saint-Marcouf, portant ainsi les forces en présence à près de 400 hommes.

Le poste de commandement des batteries de Crisbecq

En Normandie, le poste de commandement des batteries de Crisbecq, également connues sous le nom de batteries de Saint-Marcouf, est le plus gros bunker du secteur Utah Beach du Mur de l’Atlantique. Autre particularité, celui-ci ne répond à aucun plan type, faisant finalement de lui, un édifice entièrement unique par sa forme et par son aménagement.

Poste de commandement des batteries de Crisbecq - Vestiges du Débarquement de Normandie à Utah Beach

Une visite guidée passionnante, dans un environnement entièrement restauré.

Sa construction débute au cours du mois de juillet 1943. Véritable forteresse aux murs de deux mètres d’épaisseur, plus de 8 000m3 de béton et 250 tonnes d’aciers auront été nécessaires à son élévation. Constitué de 10 pièces, réparties sur 4 niveaux différents, son poids est d’environ 10 000 tonnes… A titre de comparaison, c’est presque celui de la Tour Eiffel.

Depuis son poste d’observation, les défenseurs allemands peuvent voir et surveiller l’ensemble de la plage d’Utah Beach et même bien au-delà ; jusqu’à la Pointe du Hoc, pourtant éloignée de 20 kilomètres. Depuis, la nature a repris ses droits et les arbres se dressent entre ces deux sites historiques.

Derrière les authentiques portes blindées, la pièce de commandement et dans le fond, la chambre des sous-officiers. Fait rarissime pour une installation de ce type, ces deux pièces sont carrelées. En fait, on peut supposer que cette construction a aussi été élaborée sans négliger l’aspect confort. Le bunker est entièrement électrifié par son groupe électrogène mais il était aussi équipé de 5 poêles permettant de maintenir une température plus qu’agréable au sein de ses murs, jusqu’au dernier niveau sous terre qui abrite les chambrées.

D’un point de vue technologique, trois lignes téléphoniques blindées et enterrées jusqu’à 5 mètres de profondeur, permettent au poste de commandement de rester en liaison permanente avec ses différentes casemates de tir mais aussi avec la batterie d’Azeville, située à 3 kilomètres, et même jusqu’à la forteresse de Cherbourg, distante de 35 kilomètres.

Le débarquement du 6 juin 1944 à Utah Beach

Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, les Américains larguent 600 tonnes de bombes sur l’ensemble de la batterie et dans les environs. La totalité des canons antiaériens, dont celui qui est positionné au sommet du poste de commandement, sont détruits. Si plusieurs soldats allemands sont tués, Crisbecq reste opérationnelle. Deux de ces canons de 210 mm sont encore en état de fonctionnement.

Walter Ohmsen - Commandant des batteries de Crisbecq - D-day 1944

Walter Ohmsen, en charge du commandement des batteries de Crisbecq dès le début de l’année 1944.

A 5h20, scrutant l’horizon depuis le poste d’observation, Walter Ohmsen aperçoit la gigantesque armada alliée. C’est le début du Débarquement de Normandie, plus de 130 000 soldats alliés s’apprêtent à investir les plages Normandes, en cette journée historique du 6 juin 1944. Noms de code : Sword, Juno, Gold, Omaha et Utah Beach.

Malgré les bombardements, les lignes téléphoniques sont restées intactes. Sans tarder, Ohmsen appelle immédiatement la forteresse de Cherbourg, faisant ainsi de lui, le premier à alerter l’Etat-Major allemand du lancement de l’opération Overlord.

A 5h52, et sur ordre de Cherbourg, la batterie de Crisbecq est aussi la première à attaquer l’armada libératrice, en faisant feu sur le secteur Utah. Plusieurs navires sont touchés et l’USS Corry est même coulé. Mais les Américains ne tardent pas à réagir et rapidement, la batterie se retrouve sous le feu des cuirassés. A 9h00, les canons de 210 mm sont hors d’état de nuire et Crisbecq doit dorénavant se contenter de combats défensifs terrestres dont l’unique objectif est désormais de retarder la progression des troupes alliées.

Bataille terrestre et l’histoire des frères Niland

Sur terre, les soldats d’Ohmsen font face aux forces du 22eme régiment d’infanterie américain et notamment de la compagnie C du 1er bataillon du lieutenant Preston Niland. Le soldat américain est tué le 7 juin, au lendemain le mort de son frère Robert. Steeven Speilberg s’inspirera de leurs histoire pour son célèbre film Il faut sauver le soldat Ryan.

Preston Niland - Batteries de Crisbecq

Preston Niland, tué le 7 juin 1944. Son histoire a inspité Steven Spielberg pour la réalisation de son film Il faut sauver le soldat ryan.

Dans la nuit du 11 au 12 juin, après six jours de combats acharnés et faute de munitions, les derniers Allemands encore en état de combattre quittent la batterie tout en parvenant à échapper à l’encerclement, et en laissant derrière eux, 21 soldats blessés intransportables.

Durant deux mois, l’ensemble du complexe est investi par les Américains, qui procèdent à de nombreux tirs d’explosifs pour détruire les installations présentes, mais aussi pour tester la résistance des fortifications allemandes. Dans le poste de commandement, l’une d’elles éventre la dalle séparant les deux niveaux intérieurs. Mais après le départ des troupes alliées, le poste de commandement et sa batterie, sont laissés à l’abandon pendant près de 70 ans.

Le Musée du poste de commandement des batteries de Crisbecq

Après la guerre, et parce que les matériaux viennent à manquer pour reconstruire la France, les ferrailleurs récupèrent près de 30 tonnes d’acier de l’édifice, dont la cloche périscopique blindée de 22 tonnes à elle seule. Laissant en trou béant en son sommet, le poste de commandement est alors laissé à la merci des intempéries et s’inonde progressivement. Par mesure de sécurité, il est ensuite totalement fermé… jusqu’en 2016.

Poste de commandement des batteries de Crisbecq - Vestiges du Débarquement de Normandie à Utah Beach

A l’intérieur du musée, des centaines et des centaines d’objets directement en rapport à la Seconde Guerre mondiale et au D-Day.

Pour le rendre à nouveau accessible, plus de 13 tonnes de gravats ont été retirés de l’édifice. A l’intérieur, plusieurs obus non explosés ont nécessité la venue de démineurs. Pour réparer les murs et la dalle intérieure, 3 tonnes de béton ont été nécessaires, 19 pour combler le trou laissé par l’absence de la cloche blindée. Le bâtiment a totalement été restauré jusqu’au système de ventilation, à nouveau en état de marche. Le poste de commandement des batteries de Crisbecq est aujourd’hui un musée privé, géré et entretenu par une association dont la seule mission consiste à conserver ce lieu historique.

A l’intérieur, des centaines et des centaines d’objets, de casques, d’uniformes, d’armes ou de documents y sont exposés comme s’ils pouvaient l’être il y a 80 ans. C’est à dire, sans presque aucune vitrine ! Certains sont d’une valeur inestimable et d’une rareté exceptionnelle alors que d’autres ont tout simplement retrouvé la place qu’ils occupaient en 1944.

Passer les portes de ce musée, c’est faire un véritable saut à pied joint dans le temps et dans l’Histoire.

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Sources et références

  • Visite guidée du poste de commandement des batteries de Crisbecq
  • Visite du musée des batteries de Crisbecq
  • Magazine Géo Histoire n°16, « La France sous l’Occupation » (septembre 2011)
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