Qu’est-ce que les élections législatives allemandes du 12 novembre 1933 ?
Les élections législatives allemandes du 12 novembre 1933 correspondent au déroulement d’un scrutin non-libre, dans lequel seul le Parti nazi (ou ses sympathisants) peut se présenter. Ces élections sont également accompagnées d’un référendum dans lequel le peuple est appelé à « se prononcer » sur la sortie de l’Allemagne de la Société des Nations.
Résultats des élections législatives du 12 novembre 1933
%
Taux de participation
- Parti Nazi (NSDAP) – 92,1% 92.1%
- Votes nuls et blancs (7,9%) 7.9%
Comment les nazis manipulent les élections ?
Depuis que l’opposition politique au Parti nazi a été anéantie, les scrutins électoraux deviennent essentiellement des exercices de propagande. Surtout, ils représentent une période au cours de laquelle le régime joue de sa puissance, pour intimider davantage la tranche de la population allemande qui n’entrerait pas encore dans les pas du national-socialisme. Désormais, il ne suffit plus seulement de s’opposer au nazisme, il faut le soutenir envers et contre tout.
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Le Parti nazi : seul Parti à pouvoir se présenter aux élections législatives de novembre
Depuis l’été précédent, le Parti nazi est le seul parti politique autorisé en Allemagne. La plupart ont préalablement été interdits ou bien ont perdu trop de membres au point de ne plus pouvoir survivre. D’autres encore, face à cette trop forte répression, ont fait le choix de se dissoudre d’eux-mêmes. Bien que celles-ci aient lieu 8 mois après les législatives du 5 mars précédent, ces élections sont de fait incontestablement bien différentes.
Pour autant, l’électorat est – et sera encore – appelé aux urnes. En réalité, sa mobilisation sert au régime, afin de conférer l’apparence de la légalité populaire à des mesures controversées.
Pour Hitler, ces nouvelles élections législatives sont l’occasion de renouveler le Reichstag, d’obtenir un parlement entièrement dévoué au national-socialisme, et surtout de se débarrasser des députés appartenant aux partis politiques désormais disparus.
Ainsi, c’est une liste unique qui est présentée aux électeurs allemands. Liste à laquelle ils doivent finalement se contenter de voter « oui » ou « non ». Néanmoins et pour rassurer une certaine classe de l’électorat, elle est tout de même agrémentée d’un – faible – nombre de conservateurs, comme von Papen ou Hugenberg, et même de quelques anciens parlementaires du centre. Evidemment, ils sont en très large infériorité.
La manipulation des urnes
Dès le 14 octobre 1933, après avoir annoncé la dissolution du Reichstag à la radio, Hitler se lance dans une nouvelle campagne et prononce des discours électoraux à travers toute l’Allemagne. Cependant et pour s’assurer une éclatante victoire, il sait pouvoir compter sur ses Chemises brunes (SA), sur une très forte propagande et surtout sur quelques combines antidémocratiques.
Avant la tenue du scrutin, des instructions confidentielles, émanant directement du ministère de l’Intérieur du Reich, sont envoyées aux présidents des bureaux de vote. Dans celles-ci, ces derniers reçoivent par exemple toute la liberté d’interpréter un bulletin « blanc » ou « nul » par un « oui ». Le jour venu, certains se chargeront eux-mêmes de remplir les bulletins non valides par des « oui ».
L’intimidation jusque dans les bureaux de vote
Le 12 novembre, et même après, peu d’Allemands n’osent se plaindre ouvertement de la flagrante manipulation. Assurément, le secret des urnes est loin d’être garanti. Dans les bureaux de vote, la présence de nazis et de Chemises brunes perturbe le déroulement des choses. Face à eux, les électeurs sont incités à voter ouvertement. C’est-à-dire sans passer par l’isoloir. Une manière de « prouver » leur loyauté envers le régime hitlérien.
Les méthodes peuvent différer d’une région à l’autre. Dans certaines, les bulletins de vote sont numérotés, de sorte à ce qu’il soit possible d’en identifier plus tardivement son propriétaire, dans le cas où ce dernier aurait « mal voté ». Ailleurs, les adversaires identifiés sont radiés des listes électorales, pendant que ceux qui refusent ostensiblement de se déplacer pour glisser le bulletin dans l’urne, sont arrêtés. La répression l’emporte sur tout.
Personne ne va oser s’abstenir, et personne ne va répondre par non à la question de confiance. Car 1) personne ne croit au secret du vote et 2) le « non » sera compté de toute façon comme « oui ».
Conséquences des élections législatives du 12 novembre 1933
Dans ces conditions, le triomphe nazi est évidemment au rendez-vous. Pour les élections du Reichstag, le Parti récolte 92,1% des suffrages. Tout de même cependant, 3,5 millions de bulletins ont été enregistrés comme « nuls ». Pour ce qui est du plébiscite, les Allemands « se prononcent » pour la sortie de l’Allemagne de la Société des Nations à 95,1% des « voix exprimées ».
Même si abstraction est faite de la manipulation évidente et de l’absence de liberté, la conclusion de cette journée du 12 novembre est implacable. A l’étranger comme en Allemagne, on se dit que Hitler est massivement soutenu par son peuple. Progressivement, il atteint le culte du « chef de la nation ». Le culte d’un homme qui s’élèverait au-dessus de toutes divisions partisanes.
Plus rien ne semble pouvoir freiner la progression du pouvoir total de Hitler. Pourtant, il peut encore lui échapper, notamment à cause des Chemises brunes dont les violences continues vont finalement mettre sa position en danger. Ce risque sera définitivement écarté après la Nuit des longs couteaux.
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