Qu’est-ce que l’incendie du Reichstag ?
Nuit du 27 au 28 février 1933
L’incendie du Reichstag est un événement majeur dans la prise du pouvoir par les nazis, en Allemagne. Utilisé comme prétexte à une impitoyable répression contre les communistes, il ouvre également la voie de la dictature à travers le décret pour “la protection du peuple et de l’État”.
Le Reichstag en ruine après l’incendie de février 1933 et les bombardements alliés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Contexte de l’incendie du Reichstag
L’incendie du Reichstag s’inscrit dans une période clé de l’histoire allemande. Arrivé au pouvoir un mois plus tôt, Hitler se prépare à faire campagne pour les prochaines élections législatives, organisée après la dissolution du Reichstag (parlement allemand).
L’arrivée de Hitler au pouvoir
Le 30 janvier 1933, Hitler arrive légalement au pouvoir : nommé Chancelier par le Président Paul von Hindenburg. Le 1er février, ce dernier accepte de dissoudre le Reichstag. De nouvelles élections législatives sont alors au programme du mois de mars suivant. Cet acte marque le début d’une campagne politique marquée par la violence et l’intimidation. Plus la date fatidique approche et plus l’hystérie s’empare de la société allemande, notamment des partisans nazis.
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La crainte du communisme
Depuis la fin des années 1920, et encore plus depuis le début des années 1930, la crainte du communisme (et du socialisme) gagne les rangs d’une partie de la société allemande. Une crainte qui – en réalité – s’apparente bien plus à une véritable haine, propulsée par la propagande nazie, jusqu’à la paranoïa. En Allemagne, le climat en devient de plus en plus insurrectionnel.
Cette crainte du communisme passe aussi largement par les urnes. Car si les nazis gagnent incontestablement des voix, les communistes aussi. Aux élections législatives de 1932, ils obtiennent près de 6 millions de votes pour 100 sièges au Reichstag, un record ! Seulement, en parallèle de ces succès politiques, se déroulent de très violents combats de rue entre le Front rouge, l’armée privée des communistes, et les SA, l’armée privée des nazis. Selon John Keegan dans son livre La Deuxième Guerre mondiale, 38 nazis trouvent la mort contre 30 communistes. Ainsi serait né le spectre d’un “soulèvement rouge”, très largement propagé et naturellement exagéré par la propagande hitlérienne.
Quoi qu’il en soit, cette haine est directement liée à l’arrivée de Hitler au pouvoir. Pour le Président de la République de Weimar, le communisme est un danger supposé bien plus grand que le nazisme. Selon lui, et bien qu’il fut son adversaire aux précédentes élections présidentielles de 1932, Hitler en serait le seul rempart.
Les élections législatives à venir
Pour Hitler, l’objectif est de faire élire un maximum de ses députés nazis, afin d’obtenir une majorité absolue au parlement. Résultat que le NSDAP (Parti nazi) n’a jamais obtenu et n’obtiendra – par ailleurs – jamais au cours d’un scrutin réellement démocratique.
En attendant la date du 5 mars, jour des élections, tous les coups sont permis pour les bandes nazies. Les communistes – en particulier – sont la cible d’une répression féroce. Ils sont molestés, blessés, ou bien même torturés. Dans les États (Länder) déjà sous contrôle nazi, leurs meetings, manifestations diverses ou publications dans la presse, sont tout simplement interdits.
Néanmoins, ce déchainement de violence choque à juste titre plus d’un Allemand. Mais Hitler, dont la qualité d’acteur n’est plus à démontrer, sait apaiser les craintes. D’après lui, ces attaques ciblées ne sont l’œuvre que d’individus extrémistes qui désobéissent aux ordres de son mouvement. Réclament un peu de patience pour – soi-disant – les ramener à la raison, rien de change et les événements s’aggraveront davantage au lendemain de cette nuit du 27 février.
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L’incendie du Reichstag et ses répercussions
Dans la soirée du 27 février 1933, Hitler et Goebbels sont en train de diner ensemble lorsque le téléphone sonne. Le Reichstag est en feu. Traversant Berlin, il est environ 22h30 lorsque les deux dirigeants nazis se rendent sur les lieux du crime.
Nuit du 27 au 28 février 1933
Arrivé à Berlin le 18 février, Marinus van der Lubbe avait déjà tenté, le 25 février suivant, d’incendier trois bâtiments de la ville. En vain. Mais ce soir là, après s’être infiltré par effraction à travers une fenêtre du palais, il parvient à déclencher un gigantesque incendie qui détruit une grande partie du Reichstag. Lorsque les pompiers arrivent sur place, il n’y a déjà plus grand chose à sauver. La verrière du toit est éventrée, de hautes flammes s’y élèvent vers le ciel et la salle plénière n’est plus qu’un brasier.
L’incendie provoqué par van der Lubbe exploité à des fins politiques
Réunis devant le Reichstag en feu, Göring, Papen, Goebbels et Hitler en sont tous convaincus : l’incendie en cours est le signal d’un soulèvement communiste. Selon Goebbels, il ne peut s’agir que d’une “ultime tentative pour semer la confusion par le feu et la terreur, afin de s’emparer du pouvoir à la faveur de la panique générale”.
Pourtant, le pyromane est rapidement arrêté et passe aux aveux. Selon Ian Kersaw, Marinus van der Lubbe est un jeu homme de vingt-quatre ans, intelligent, solitaire et sans attache avec aucun groupe politique. Dans son pays natal, il avait appartenu aux jeunesses communistes avant de rompre avec le PC (Parti communiste), en 1931. En revanche, toujours selon l’auteur de la biographie de Hitler, il est animé d’un sens aigu de l’injustice face à la misère de la classe ouvrière dans le système capitaliste. Décidé à commettre ce geste spectaculaire, il avait pour but de galvaniser la classe ouvrière et de l’inciter à se battre contre la répression dont elle est victime.
Selon les premiers policiers à l’interroger, il ne fait aucun doute que van der Lubbe a agit seul. Mais pour les nazis, l’occasion n’est que trop belle. Comme l’annoncera Hitler à ses ministres le lendemain, le combat contre les communistes ne doit plus attendre et ne doit encore moins s’embarrasser de “considérations juridiques”.
C’est un signe de Dieu, Herr Vice-chancelier ! Si ce feu, comme je le crois, est l’œuvre des communistes, nous devons écraser cette peste meurtrière d’une poigne de fer !
L’arrestation des cadres et des députés communistes
Dans la nuit même du 27 au 28 février, la rafle des députés et des cadres communistes débute déjà, à l’occasion de véritables raids menés par les SA et la SS. Enfermés dans des prisons improvisées, ils sont battus, torturés et même dans certains cas assassinés. Au delà des communistes, les nazis en profitent également pour arrêter des sociaux-démocrates, des syndicalistes ou encore des intellectuels de gauche. D’ici le mois d’avril, plusieurs milliers de personnes seront placées en “détention préventive”. En bref, l’opposition politique au nazisme est clairement ciblée.
Le décret “pour la protection du peuple et de l’état”
Au lendemain de l’incendie du Reichstag, le ministre de l’Intérieur du Reich, Wilhelm Frick, met au point un projet de décret d’urgence “pour la protection du peuple et de l’Etat”.
Débattu lors du conseil des ministres qui se tient en fin de matinée, le texte contient un bref paragraphe permettant de suspendre les libertés d’expression et d’association, de la presse et du respect du caractère privé des communications postales et téléphoniques. Un autre paragraphe donne le droit au gouvernement du Reich d’intervenir pour rétablir l’ordre dans toute l’Allemagne, bafouant l’autonomie des Länder.
Adopté le jour même par le Président de la République Paul von Hindenburg, ce décret ouvre incontestablement le voie de la dictature en Allemagne. Ne devant être qu’une mesure d’urgence, il deviendra la “charte” du Troisième Reich nazi.
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