Histoire et Mémoire de la Seconde Guerre mondiale

La déclaration de guerre franco-allemande

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Quand la France déclarait la guerre à l’Allemagne

3 septembre 1939

Le 3 septembre 1939, dans les environs de 17h00 et juste après son allié britannique, la France déclare la guerre à l’Allemagne nazie, qui vient d’attaquer la Pologne sans déclaration de guerre. La mobilisation générale est décrétée et les troupes françaises se rassemblent avant de rejoindre le front.

Photographie vintage libre de droit

Photographie d’illustration © Fortitude Studio

Un dernier été avant la guerre

Eté 1939, quelques chanceux vacanciers éloignés de la capitale et des cités industrielles, prennent du bon temps au milieu du paradisiaque paysage de la Côte d’Azur. Pour ces français, c’est un vent de légèreté, une parenthèse de bonheur précédée d’une dure année d’angoisse de labeur. Les enfants courent sur le sable brulant devant l’objectif des rares caméras familiales avant de partir à l’assaut des vagues d’une mer au bleu éclatant.

Les repas s’éternisent autant que les siestes qui s’en suivent. Le mélodieux chant des cigales, transporté par une brise douce, apaisante et reposante accompagne les balades estivales. Oui, c’est un vent de légèreté, une pause de vie, une pause de partage en intimité. L’occasion n’est que trop rêvée pour tourner le dos à ces grondements venus plus à l’Est. Un orage approche dangereusement, menaçant sur son passage d’engloutir à jamais le vent de la liberté.

La menace nazie

Sombre, ténébreux et orgueilleux, il se propage encore plus vite que ses propres éclairs de colère. Le vent tourne, se renforce et emporte sur son passage les fondements des sociétés modernes et évoluées d’une Europe désormais en crise.

L’Allemagne, “étouffée par un traité de paix déséquilibré”, en quête de solutions à ses difficultés récemment rencontrées, s’est réfugiée dans une dictature idéaliste, énergique certes, mais terriblement mensongère et raciste. L’Espagne en a fait tout autant, tout comme l’Italie, pourtant grand allié de la France et du Royaume-Uni, que ces derniers, à coups de morales déplacées, viennent imprudemment de jeter dans les bras de Hitler.

L’Europe est en danger et sur le point d’atteindre un point de non-retour, les alliances passées volent en éclats, à la plus grande satisfaction du dictateur nazi, libre d’agir en toute impunité ou presque. Pourtant, un dernier espoir persiste encore, celui de l’URSS avec qui les deux démocraties négocient un accord visant à contenir les folles ambitions expansionnistes d’Adolf Hitler.

L’Allemagne de Hitler dans l’Europe des années 1930

Lundi 30 janvier 1933. Ce que peu, hormis les fanatiques nazis, n’avaient jugé probable, devient réalité. Adolf Hitler, l’enfant raté de Vienne, l’inconnu soldat allemand, le gueulard des brasseries de Munich, est nommé Chancelier du Reich par le Président Paul von Hindenburg. Lorsqu’un an plus tôt, ce dernier remportait les élections face à Hitler, en 1932, ce devait être la fin du fanatique parti nazi et de ses membres. Incontestablement, c’était une erreur de le penser.

Hitler et son Parti nazi

Hitler est un obstiné agressif et il le prouvera jusqu’à sa mort. Jamais, il ne quitte son ambition pour le pouvoir et ce, même lorsque tous les évènements possibles jouent contre lui. Il a tissé un réseau composé de personnalités politiques et industrielles hautement bien placées. Ce qu’il ne parvient pas à obtenir lui-même, les autres s’en chargent à sa place.

Son Parti nazi (NSDAP) fait plusieurs fois face à de graves problèmes de trésorerie, il n’a jamais besoin de s’en inquiéter. Il a longtemps été moqué mais a rapidement su tirer les bénéfices d’une propagande bien orchestrée, découvre la puissance des mots et par la même occasion, son auditoire.

Ses adversaires politiques, outre le mépris qu’ils ont à tord pour ses talents d’orateur, réalisent peu la soif gigantesque qu’il a du pouvoir. Pire encore, il est très rarement décrit comme un personnage potentiellement dangereux. Que ce soit en Allemagne ou en Europe.

Pourtant, et s’il montre à plusieurs reprises son – soi-disant- attachement à la paix et à la légalité, il promet aussi des têtes, l’écrasement de la France et l’élimination des Juifs. Il promet également de casser le traité de Versailles et de combattre “par l’épée” pour la création d’un espace vital à l’Allemagne, une fois les armées du pays reconstituées.

Selon Ian Kershaw, dans la biographie qu’il consacre au dictateur allemand, il n’est en rien une erreur parmi toute l’histoire de l’Allemagne. Si Hitler sait exploiter toutes les causes et faiblesses de ses adversaires à ses fins, il n’est cependant possible uniquement parce qu’on lui en laisse l’opportunité et parce qu’il est arrivé dans la seule et unique période possible de l’histoire où il peut être quelqu’un.

Dans un autre contexte, une autre époque, dans une autre société, probablement serait-il encore en train de vendre ses toiles dans les rues de Vienne pour se payer de quoi manger.

Le douloureux souvenir de 14-18

Mais la guerre 14-18 est passée par là. Elle laisse sur son passage tous les ingrédients pour qu’un tel personnage, capable d’envouter les foules, puisse naitre et gravir les échelons d’une société très évoluée, culturellement riche et développée.

L’Allemagne n’aurait jamais dû prendre ce virage dramatique et fanatique. Mais les politiciens et les autorités, non pas seulement de la République de Weimar mais de l’Europe entière, se voilent la face ou détournent le regard. Ils laissent Hitler prospérer sur les coûts et l’inégalité du traité de Versailles, jeter tous les maux de son pays sur les responsabilités de la France alors même que la population allemande s’enfonce dans la plus grave crise économique de son histoire. Le chômage explose et la pauvreté s’installe. Tous les ingrédients sont réunis et les coupables des malheurs allemands sont pointés du doigt.

“Hitler est Chancelier du Reich. Exactement comme dans un conte de fée”, écrit Goebbels. La machine nazie est en marche.

Les Accords de Munich

“Les cons”, aurait laché Edouard Daladier dans la voiture qui le mène depuis l’aéroport du Bourget, jusqu’au siège du ministère de la guerre. Plus de 500 000 personnes l’ovationnent alors qu’il est lui-même persuadé d’avoir commis l’irréparable.

Éviter la guerre coûte que coûte

De nouvelles fortes tensions voient le jour en Europe. Le 11 mars 1938, l’Allemagne a annexé l’Autriche et récemment, Hitler vient d’invoquer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et annonce donc naturellement qu’il annexera, le 1er octobre, la région des Sudètes, territoire composé d’une minorité allemande. A ce moment précis, il sait très bien que cela implique une déclaration de guerre avec la France et le Royaume-Uni, puisque ces derniers se sont engagés à défendre et à reconnaître les frontières de la Tchécoslovaquie.

Face à cette menace, la France mobilise ses réservistes. Mais afin d’éviter un conflit armé, Benito Mussolini, le nouvel allié de Hitler, propose d’organiser une conférence pour régler une bonne fois pour toute la question des Sudètes.

La “paix sauvée”

Ainsi, le 29 septembre 1938 la France, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Allemagne sont respectivement représentés par Daladier, Chamberlain, Mussolini et Hitler lui-même. Étonnamment, le pays concerné, à savoir la Tchécoslovaquie, n’est pas invitée aux discutions et n’est donc non représentée.

La situation est plus que particulière. En réalité, hormis le dirigeant allemand, aucun pays, aucune population, ne souhaite la guerre. Les britanniques ont massivement investi en Allemagne à l’issue de la Première Guerre mondiale. A ce propos, le Premier ministre a déjà annoncé à Daladier que son pays ne s’engagera pas dans une guerre “pour la Tchécoslovaquie”. Le risque financier parait bien important et Chamberlain croit encore en sa politique d’apaisement avec Hitler. En France, les élections approchent et une opération d’envergure militaire ne ferait probablement pas grimper les intentions de vote. Finalement, Adolf Hitler est bien le maître du jeu. Du moins, il en est le maître car les puissances occidentales veulent bien le laisser faire.

Il ne faut pas croire que l’ensemble du peuple allemand souhaite la guerre. C’est même l’inverse. Si ce dernier est très reconnaissant envers Hitler d’avoir – provisoirement – rétablit la situation économique du pays par de nombreux investissements militaires et par l’annexion de l’Autriche, sans le moindre coup de feu, il ne désire qu’une seule chose ; la paix.

Mais cette paix à un coût terrible, celui du sang et personne ne souhaite le payer. Léon Blum se dit partagé entre un “lâche soulagement et la honte”. Pour cause, la France abandonne purement et simplement son allié qu’est la Tchécoslovaquie, en échange de vagues promesses de paix. Plus de 250 000 Tchèques sont contrains de quitter la région des Sudètes avant le 10 octobre. Hitler vient d’obtenir l’autorisation d’annexer la région. Il n’y aura donc pas de guerre, au plus grand soulagement des populations occidentales. Pourtant, la France perd bien plus qu’un allié. Elle perd tout le crédit moral dont elle disposait en Europe et permet en plus à l’Allemagne de renforcer sa puissance politique et militaire. Cependant, elle gagne un précieux temps dans l’élaboration déjà tardif de son réarmement. L’Union Soviétique, non conviée aux négociations, s’éloigne des deux démocraties.

La paix est donc sauvée. Daladier et Chamberlain sont ainsi respectivement accueillis dans leur pays en héros, comme les sauveurs de paix. Ainsi, le président du Conseil change d’avis sur les négociations abouties à Munich. Il reste néanmoins conscient que la paix élaborée reste précaire et fragile. De l’autre côté de l’Europe, en Tchécoslovaquie, la presse titre “la trahison de Munich”. Le pays perd l’intégralité de ses défenses militaires. Sa ligne de défense, l’équivalent de la ligne Maginot, est justement située dans la région annexée. Sous l’emprise totale du Reich allemand, le pays ne tiendra que quelques mois.

Mais le dictateur à d’autres projets et déjà ses yeux se tournent vers la Pologne.

Vers une alliance militaire avec l’URSS ?

Depuis plusieurs semaines, Hitler multiplie les menaces à l’encontre de la Pologne. Cette dernière réclame ainsi l’aide de la France et du Royaume-Uni. A nouveau, les tensions font les actualités et les menaces de guerre sont une nouvelle fois réelles.

L’ultime chance pour éviter la guerre

Lutter sur deux fronts géographiquement opposés, à l’Est et à l’Ouest, rendrait la tâche plus qu’incertaine à l’Allemagne. C’est dans cet objectif que démarrent au début de l’été 1939, des négociations visant à créer une convention militaire entre l’URSS, le Royaume-Uni et la France. C’est dans ces négociations que la paix à encore une chance de reprendre l’avantage et c’est également dans ces négociations que le gouvernement et les Français reposent tous leurs espoirs. Mais dans cette période incertaine, où rien ne se passe comme prévu, un coup de tonnerre peut encore cacher une nouvelle plus foudroyante encore.

Si la politique d’apaisement de Chamberlain paraît être un lointain souvenir, son gouvernement peine cependant à accepter les conditions de Staline. Méfiant à son égard, il craint les ambitions potentiellement secrètes et dangereuses de l’URSS à l’encontre de la Pologne. Les négociations s’enlisent et face à l’urgence de la situation, Paris presse Londres, son plus grand allié, de trouver un accord. En vain.

Durant tout le début de l’année 1939, l’Europe se déchire à coups de revendications et de déclarations menaçantes et intimidantes.

Mussolini, piqué à son tour par le virus de l’expansion de son territoire, revendique la ville de Nice et la Corse alors même qu’il a déjà envahi l’Ethiopie et conclu un pacte avec l’Allemagne. Hitler, sur fond de projets identitaires et toujours dans l’idée d’agrandir son “espace vital”, revendique la ville polonaise de Dantzig, ce à quoi britanniques et français promettent une assistance militaire en cas d’agression.

Mais rien ne semble pouvoir arrêter Hitler qui détient désormais la plus grande et plus développée armée du vieux contient.

Seul un accord avec les Soviétiques permet encore d’espérer un maigre espoir de paix.

Le pacte germano-soviétique

Mercredi 23 août 1939. Un terrible tremblement de terre vient de secouer l’ensemble des populations et des sphères politiques françaises et britanniques. Il n’y aura pas d’accord avec Staline et les Soviétiques. Il n’y aura pas d’accord car ces derniers viennent de conclure un pacte de non-agression avec l’Allemagne de Hitler. Ce pacte est secrètement accompagné d’un protocole permettant à l’URSS de s’emparer d’une partie du territoire de la Pologne. Hitler sait placer ses pions et sait jouer des intérêts de ses rivaux et potentiels ennemis.

La guerre devient inévitable

Désormais, c’est une prise de conscience générale et brutale. La guerre est inévitable. A nouveau, il y aura des peurs, des morts et des pleurs. Dès le lendemain, le jeudi 24 août, le Gouvernement français dirigé par Edouard Daladier, décrète la mobilisation partielle. Tout s’accélère brutalement.

Deux jours plus tard, la France avertie une nouvelle fois l’Allemagne. Comme le Royaume-Uni, elle tiendra ses engagements envers la Pologne. Mais rien ne semble inquiéter le Chancelier. Sûr de lui, il adresse par radio un ultimatum au gouvernement polonais dans lequel il exige le rattachement de Dantzig au Reich ainsi que l’organisation d’un plébiscite pour décider du rattachement, ou non du pays entier.

De son côté, et sur ordre de Hitler, Himmler, monte de toutes pièces, une attaque polonaise contre un émetteur radio allemand, situé à la frontière des deux pays.

L’été n’est pas terminé, il parait pourtant déjà loin. L’Europe est au bord d’un gouffre sans fond.

La déclaration de guerre

La machine administrative se met en marche. Ce samedi 2 septembre 1939, les français découvrent les affiches aux deux drapeaux tricolores entrecroisés qui dominent “l’ordre de mobilisation générale”. Placardées sur les murs des villes et des villages, devant elles, se forment de petits groupes souvent silencieux. Il n’y a point d’enthousiasme, pour autant, point de fatalité et de défaitisme non plus.

Mobilisation générale

Les plus âgés se souviennent de la grande guerre, les “gueules cassées” sont encore visibles  alors même que des femmes, endeuillées de cette même période, s’habillent encore de vêtements noirs. Les plus jeunes ne réalisent pas vraiment, pourtant, c’est eux qui formeront le plus gros des troupes. L’ampleur de la mobilisation est gigantesque et en perturbe, à juste titre, plus d’un.

Les détenteurs des fascicules de mobilisation 1, 2 et 3, les rappelés, les réservistes, officiers, sous-officiers et hommes de troupes se pressent vers les centres mobilisateurs. Au total, 2 700 000 hommes se retrouvent aux armées, 2 300 000 autres restent en réserve, en arrière du front. Soit environ un huitième de la population active qui est ainsi mobilisée. Ces hommes convergent vers les gares dans une confusion relative due à l’ampleur de la mobilisation.

La veille, le 1er septembre 1939, Hitler a attaqué la Pologne sans déclaration de guerre. Une quantité impressionnante de chars, accompagnés de l’aviation et de l’infanterie submergent et déstabilisent le pays tout entier. Les généraux allemands mettent en exécution le principe de la “guerre éclaire”. La ligne rouge est franchie. La France et la Grande-Bretagne se préparent enfin à réagir.

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