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Histoire et Mémoire de la Seconde Guerre mondiale

L’armée française des années 1930 à 1940

par | 30 Déc 2020

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L’état de l’armée française

A l’aube de la Seconde Guerre mondiale

L’armée française des années 1930 à 1940 a fait et fait encore l’objet de nombreux débats. Pour la comprendre, mais aussi pour comprendre les conséquences et causes survenues en mai 1940, il faut davantage se pencher sur l’aspect technique, tactique et politique dont elle est victime plutôt que sur le faible moral et le manque d’acharnement des soldats, trop souvent et faussement régulièrement mis en avant.

Commémorations mémoire de la Seconde Guerre mondiale

Image d’illustration © Fortitude Studio

L’armée française à l’issue de la Grande guerre

Pour comprendre l’armée française de 1940, il faut avant tout comprendre, ou du moins connaître un minimum, celle de 1918. L’occasion nous est aussi donné de remettre en doute certaines légendes issues de la propagande anglo-américaine pour la plupart.

La meilleure armée du monde

Dans les dernières heures de ce premier conflit mondial, l’armée française est forte de 110 divisions, 13 200 pièces d’artillerie, 2 300 chars et 3 600 avions. En comparaison, l’armée britannique est constituée de 62 divisions, 8 700 pièces d’artillerie, 610 chars et 1 700 avions.

De son côté, l’armée américaine est en possession de 16 divisions (dont 8 seulement ayant l’expérience des combats), 3 556 pièces d’artillerie, 90 chars et 740 avions. Il est aussi important d’ajouter qu’elle n’entre véritablement en action qu’en septembre 1918, qu’elle est instruite par des officiers français et qu’elle est équipée en armes lourdes françaises.

En somme, la supériorité tricolore ne fait donc aucun doute. On est loin d’une armée au bord du gouffre, secourue de justesse par celle de l’Oncle Sam comme cela a souvent été décrit.

Comme l’écrivent le colonel Michel Goya et Pierre Grumberg, l’armée française est en 1918 à son zénith et donc très loin de ce qu’elle était encore deux années plus tôt. Cette dernière est désormais soutenue par une industrie intensive et productive. Elle est commandée par des chefs novateurs, qui déploient de nouvelles stratégies militaires encore jamais présentées. De plus, elle est pour l’époque, fortement motorisée.

De fait, la France n’est pas seulement la meilleure armée alliée, elle en est très probablement et à juste titre, la meilleure du monde. La mieux équipée, la mieux dirigée et la plus novatrice. Fait souvent occulté par l’Histoire, c’est bien elle qui sauve 40 divisions britanniques en Picardie (mars 1918) et dans les Flandres (avril 1918) avant de contenir quasiment à elle seule les fortes offensives allemandes de mai à juillet cette même année.

L’humiliation allemande volontairement évitée

Tout de suite après l’armistice du 11 novembre 1918, le commandement allemand fait croire à son peuple qu’il ne s’agit pas d’une défaite militaire, mais d’une simple « trêve ». Selon lui, on ne peut parler de revers militaire puisque les Alliés n’ont occupé aucune surface du territoire allemand. Mais qu’en est-il de la réalité ?

Il faut dans un premier temps préciser que les Alliés ont bel et bien marché en Allemagne. Aussi minime soit cette marche, l’armée allemande a bien été enfoncée dans son propre territoire. Jusqu’à 200 kilomètres à certains endroits.

A ce moment, l’Allemagne est uniquement réduite à une stratégie de défense de son territoire et ne peut plus échapper à une cuisante défaite. Le sort de cette dernière s’est joué sur ses offensives manquées entre mars et juillet 1918. La seconde victoire de la Marne, remportée par 63 divisions françaises, deux italiennes, deux britanniques et six américaines, annonce la fin prochaine de la Première Guerre Mondiale.

Dans l’objectif de porter le coup de grâce – le coup fatal – le général Pétain planifie une ultime offensive en territoire ennemi. Le but de l’opération est simple : occuper un vaste territoire et humilier l’adversaire. Mais cette attaque n’aura finalement jamais lieu.

L’Allemagne épargnée pour son potentiel industriel ?

Les politiques et chefs militaires britanniques et américains ne répondent pas favorablement aux ambitions de Pétain. Ils souhaitent terminer cette guerre au plus vite, quitte à se passer d’un triomphe militaire.

En réalité, le potentiel industriel de l’Allemagne est bien alléchant. Britanniques et Américains y prévoient déjà des investissements à l’issue de la guerre. Dès lors, il s’agit surtout de ne pas trop humilier le futur partenaire commercial et industriel. Les Alliés parviennent ainsi à convaincre le général Foch (commandant en chef des troupes alliées du front occidental). L’offensive est annulée.

Les conséquences de cette non-attaque sont aussi simples qu’elles sont désastreuses. L’armée française, accompagnée de ses alliés, est pourtant totalement à la hauteur de cette ultime bataille, qui aurait contribué à une victoire claire et définitive. Au lieu de ça et sans le savoir, les Britanniques et les Américains servent sur un plateau les arguments d’une nouvelle guerre. Dans un futur proche, le dictateur Adolf Hitler pourra dénoncer et souligner « l’imposture » de la victoire des Alliés et de « l’ennemi mortel du peuple allemand » : la France.

De fait, par la propagande anglo-américaine, ajoutée à celle des nazis, l’image de l’armée française est dégradée ou du moins, son image à l’international n’est pas à la hauteur de ses exploits, avant même qu’elle ne se dégrade techniquement elle-même, durant l’entre-deux-guerres.

L’armée française à partir des années 1930

Même si elle en sort victorieuse, la France paye aussi lourdement la Grande Guerre. Economiquement bien entendu mais aussi moralement. Les Français, ou du moins une partie, se laissent dominer par un sentiment pacifiste. Vivre en paix, oublier les sanglantes batailles et penser à demain en deviennent les seules obsessions. Ainsi, les mesures gouvernementales suivent l’opinion et l’armée n’est plus une priorité.

Un budget en chute libre

Pour autant, au cours des années 20, l’investissement militaire ne cesse pas pour autant et l’armée développe une marine moderne et puissante qui en devient rapidement la quatrième plus puissante du monde (après les flottes américaine, japonaise et britannique).

C’est à partir de 1930 que la France s’engage dans une importante diminution de son outil militaire. Parallèlement, elle s’engage aussi dans une politique de désarmement au cours de la conférence de Genève. Ainsi de 1931 à 1935, le budget de l’armée diminue de 32%. Le reste du budget militaire est principalement alloué à la construction de la ligne Maginot, dont les travaux débutent en 1929.

La baisse de ce budget s’explique aussi en partie par la crise économique mondiale qui n’épargne par la France à partir de 1930. L’ensemble des gouvernements successifs se servent ainsi dans les « caisses » de l’armée pour combler certains « trous financiers » de la République. Inévitablement, une telle baisse financière entraîne des conséquences aussi bien stratégiques que qualitatives.

Un matériel de guerre dépassé

Au début des années 1930, le seul réel investissement pour l’armée est la construction de la très coûteuse ligne Maginot. Mais avec un budget en forte baisse comme expliqué plus haut, l’Etat est contraint de faire des choix. Des choix pour limiter les dépenses, mais aussi des choix pour ne pas aller à l’encontre de l’opinion publique.

La France se concentre donc sur la construction de sa ligne, bientôt faussement réputée infranchissable. Mais cette ligne de béton est montée au détriment des matériels et des équipement qui ne sont plus renouvelés et dont la modernisation est passée au second plan. Autre fait important, l’évolution vers la mécanisation de l’outil militaire n’est pas actée. En cette période de paix, l’armée française se repose sur ses qualités acquises en 1918.

Les effectifs de l’armée française diminués

Il existe bien un autre fait qui peut potentiellement expliquer la forte baisse budgétaire accordée à l’armée. Le 31 mars 1928, une nouvelle loi modifiait déjà en profondeur l’outil de guerre français. Le service militaire obligatoire passait de deux ans à un an. Evidemment, le nombre de soldat baisse drastiquement (même si en compensation, l’effectifs des militaires de carrière est légèrement augmenté) et cela entraîne bien d’autres problématiques.

Du fait du grand « turnover » imposé à l’armée par la baisse de la durée du service militaire obligatoire, les régiments ne parviennent jamais au stade « opérationnel ». En l’état actuel des choses, l’armée française ne présente même plus assez d’unités pour couvrir l’ensemble de son territoire en potentiel temps de guerre. Enfin et il s’agit probablement de la conséquence la plus pénalisante pour le pays en matière de politique étrangère, la France n’est plus en capacité de mener la moindre offensive. Ni sur son territoire, ni en Europe, alors même que l’environnement extérieur de l’hexagone se dégrade avec l’arrivée de Hitler au pouvoir en Allemagne et de son réarmement intensif.

Une stratégie militaire uniquement axée sur la défense

Après la Première Guerre mondiale, la France comprend rapidement que l’Allemagne n’est pas morte. Certes, elle souffre économiquement mais ses usines et ses moyens de production son intacts. Hormis quelques bombardements, son territoire n’est pas, ou très peu, endommagé. Elle reste, malgré les sanctions imposées par le traité de Versailles, une nation militairement dangereuse et une menace constante.

La construction de la ligne maginot

La ligne Maginot est un héritage des enseignements de la Grande Guerre. Seule, la France ne peut assurer la protection de son territoire et le projet pensé par André Maginot est entièrement justifié. Son élaboration est rapidement pensée par crainte et par prévention d’une nouvelle attaque allemande. Plus question de gaspiller le sang français comme cela a été le cas en 14-18. Mais sa construction, complexe et gigantesque, fait l’objet de nombreuses modifications et les travaux prennent du retard, souvent par faute de moyens.

Au final, elle est globalement faite de sorte à protéger le territoire national de la Méditerranée jusqu’à la Manche. Cette « forteresse » est en réalité constituée d’un système de défense discontinu, est composée de fortifications bétonnées (casemates, blockaus…), et d’obstacles comme les barbelés, de fossés antichars ou encore de zones inondables. La nature est aussi invitée à défendre le sol français. C’est le cas de la forêt des Ardennes, une faille face à la guerre moderne que le gouvernement français n’imagine encore pas.

La défense comme meilleure attaque ?

La France, par l’intermédiaire d’Edouard Daladier en 1927, s’engage à ne plus jamais déclarer « la guerre à aucun peuple » mais qu’elle est cependant « résolue, fermement résolue, à maintenir intacte ses frontières ». Résultat, l’état-major, avec les moyens dont il dispose, s’oriente vers une stratégie uniquement défensive, statique et attentiste.

Entre 1931 et 1939, plusieurs plans sont ainsi élaborés mais ils ne varient guère. Tous sont pensés autour de la ligne Maginot, qui abrite entre 200 000 et 220 000 soldats entre 1939 et 1940 et la mission générale en reste la suivante : permettre dans un premier temps une défense initiale et assurer sans esprit de recul. Parer aux tentatives de débordement des troupes allemandes, protéger les centres vitaux de l’est de la France et permettre un temps de mobilisation de l’armée aux frontières.

L’objectif est donc de contraindre l’ennemi à s’engager dans une guerre longue et d’usure afin de laisser le temps à l’armée française de monter en puissance pour ensuite s’engager dans une contre-offensive avec ses alliés.

L’utilisation des blindés

En 1936, une nouvelle guerre contre l’Allemagne devient subitement une réalité et la France se lance alors dans une modernisation de dernière minute de son outil militaire. Des sommes considérables sont allouées à l’armée française : 14 milliards de francs en cette même année, 12 milliards en 1938 et 65 milliards en 1939 sur un plan de quatre ans. Effet de cause, l’armée française va fortement évoluer.

De gros efforts sont souhaités pour l’aviation et les systèmes de défenses antiaériens, ainsi que la modernisation des matériels et donc des chars modernes. La ligne Maginot n’est plus une priorité. Mais l’industrie française n’est pas prête et les pleines capacités de production ne sont atteintes qu’en 1939.

A partir de cette date, les matériels et équipement sortent en nombre. Seulement et pour la plupart, ils sont inadaptés à la guerre moderne, parfois déjà obsolètes et surtout, ils sont mal répartis sur le territoire.

Si l’état-major note bien l’apparition des chars, (ils existent déjà en 14-18 mais connaissent une formidable évolution) rappelons que ce dernier est engagé dans une politique militaire de défense et non dans une stratégie offensive. Les missions principales sont donc données à l’infanterie et à l’artillerie. Les chars eux, ont un rôle secondaire de « colmatage » des éventuelles brèches profondes.

Dans son ouvrage publié en 1934 et intitulé « Vers l’armée de métier« , le colonel De Gaulle préconise la création de divisions blindées autonomes. Il imagine ces dernières particulièrement efficaces pour rompre les fronts et effectuer des percées. Mais cette idée faite de l’armée blindée, utilisée dans des campagnes offensives, est systématiquement rejetée par le commandement militaire. En revanche, un certain Heinz Guderian, officier allemand, saura parfaitement exploiter le livre de De Gaulle et il en fera une parfaite démonstration en 1940.

Le début de la Seconde Guerre mondiale

Le vendredi 1er septembre 1939, l’Allemagne attaque la Pologne sans déclaration de guerre. De nombreux chars, accompagnés de l’aviation et de la Wehrmacht (infanterie allemande) submergent très rapidement l’allié français. Hitler inaugure alors le principe de « guerre éclaire ». Pour cause, deux mois plus tard, l’Est de la Pologne est annexée au Reich. Du jamais vu.

La « guerre éclaire » et l’avertissement de la campagne de Pologne

Théoriquement et lorsque le Royaume-Unis et la France déclarent la guerre à l’Allemagne nazie, elle est donc pleinement consciente des capacités militaires et des tactiques opérées par l’armée allemande. L’état-major français connait les actions combinées des divisions de Panzers (divisions blindées) et de la Luftwaffe (aviation allemande). Mais pour des raisons encore obscures, ce dernier est persuadé que les combats à l’Ouest ne se dérouleront pas de la même façon. Ainsi, aucune évolution ni rectification du plan militaire n’est alors apporté.

Hitler est, selon son entourage, livide, surpris, pour ne pas dire choqué. Dans ses nombreux plans envisagés, il ne croyait absolument pas capables la France et le Royaume-Uni d’une telle réaction. Le Führer est inquiet. Pour cause, la grande majorité de son armée est engagée dans la campagne de Pologne. A l’Ouest, sa frontière est maigrement défendue, elle ne fera pas le poids face à une offensive ennemie d’envergure.

Mais le haut-commandement de l’armée française, obstiné dans une doctrine défensive désormais dépassée, ne réagit pas. Aucune offensive forte n’est lancée contre l’Allemagne. Probablement cette dernière aurait changée l’Histoire de la Seconde Guerre Mondiale qui peut-être, ne serait d’ailleurs pas devenue mondiale.

Néanmoins, il ne s’agit là que de suppositions, potentiellement fausses. Quoi qu’il en soit, la France ne saisit pas cette incroyable opportunité. La « Drôle de guerre », laisse un formidable temps à Hitler pour retenir les leçons enseignées par la conquête de la Pologne et ainsi de reconstituer ses troupes pour organiser l’invasion de la France.

L’armée française de 1940 en chiffres

Au mois de mai de l’année 1940, alors que débutent les hostilités avec l’Allemagne, l’armée française est ainsi constituée : 63 divisions d’infanterie sont déployées, elles sont également accompagnées de 7 divisions d’infanterie motorisées, 6 division blindées, 5 division légères de cavalerie et 13 divisions d’infanterie de forteresse (spécialisées dans la défense de la ligne Maginot). La France possède donc 94 divisions actives mais aussi 17 autres divisions d’infanterie de réserve, soit un total de 111 divisions incluant la Légion étrangère et les troupes coloniales.

Composition générale des divisions

En regroupant l’armée britannique (9 divisions d’infanterie et une division blindée), l’armée belge (22 divisions d’infanterie) et l’armée hollandaise (10 division d’infanterie), les forces alliées représentent ainsi 156 divisions, dont 7 blindées.

De son côté et uniquement sur le front Ouest, l’armée allemande engage 118 divisions d’infanterie, 6 divisions d’infanterie motorisées, 10 divisions blindées et une division de cavalerie, auxquelles il faut encore ajouter 22 divisions d’infanterie de réserve. Les forces allemandes déploient alors un total de 157 divisions (dont 10 blindées) face aux armées alliées.

Les forces blindées

Arrêtons nous un instant sur les blindés. Car ses derniers ont un rôle primordiale en 1940. L’armée allemande attaque le front de l’Ouest en engageant 3 039 chars modernes. La France, malgré un retard certain dans la conception de ses divisions blindées est finalement capable d’en aligner 3 254. Notons cependant que, comme nous l’avons vu plus haut, ces derniers sont, de manière générale, inférieurs aux chars allemands.

Les Britanniques engagent 600 chars et les Belges 270. Cela porte ainsi les forces blindées alliées à un peu de 4 000 unités contre 3 039 du côté allemand. Au final, on peut donc parler d’une relative supériorité numérique. On ne peut cependant clairement pas parler de supériorité technique et stratégique tant les divisions Panzers sont efficacement supérieures. Et c’est d’ailleurs bien là que se fera toute la différence au cours de la bataille de France.

A titre d’exemple, la char français B1 bis, élaboré en 1937, considéré comme le plus moderne et puissant et qui représente environ 8% de la totalité des blindés tricolores, est équipé d’un premier canon de 75 mm, d’un second de 47 mm et de deux mitrailleuses en tourelle. Il a une autonomie moyenne de 150 km pour une vitesse comprise entre 20 et 25 km/h. Le reste de la force française est majoritairement équipée de vieux canons 37 mm de 1918, peu efficaces pour cette guerre dite « moderne ».

Si les chars français sont beaucoup mieux blindés (entre 40 mm et 60 mm en moyenne) que ceux allemands (entre 15 mm et 30 mm en moyenne), il sont aussi bien plus lents. En effets, les blindés de l’armée française se déplacent à une vitesse moyenne de 20 à 30 km/h contre 40 à 55 km/h pour les divisions Panzers, sans parler de l’autonomie de 150 kilomètres contre plus de 200 côté allemand.

Autre fait important et qui concerne davantage l’aspect tactique que technique, l’armée allemande utilise ses chars de manière massivement regroupée et en premières lignes. Les chars français eux, dont dispersés et restent principalement en retrait dans l’objectif, comme nous l’avons vu, de colmater les éventuelles brèches.

Le cas de l’aviation

Durant l’entre-deux-guerres, le général Pétain prédisait que l’aviation aurait un rôle crucial lors d’un prochain conflit. Sur ce coup, il avait vu juste ! L’armée allemande engage 3 900 avions (1 500 chasseurs, 1 500 bombardiers et 900 appareils de reconnaissance). L’armée française elle, engage 1 300 avions (630 chasseurs, 270 bombardiers et 400 de reconnaissance). En ajoutant les 1 900 appareils britanniques et environ 200 autres belges ou hollandais, le contrôle du ciel s’annonce bien partagé, à condition de ne pas prendre en compte les différences techniques, encore une fois trop importantes.

En 1939, est considéré moderne, tout avion dépassant la vitesse de 400 km/h et étant équipé de tous les perfectionnements techniques de cette même époque. En France, seuls quelques types d’appareils peuvent ainsi y être classés : les Morane-Saulnier MS-406, les Morane-Bloch MB-152, les Curtiss H-75 et les Dewoitine D-520. L’armée de l’air française rassemble donc seulement 440 avions de chasse modernes et à peine 50 de reconnaissance sur son total de 1 300 appareils rappelons-le. Ce chiffre évoluera tout de même légèrement en 1940 avec l’effort industriel.

Du côté allemand, la Luftwaffe, nouvellement recrée par le réarmement voulu de Hitler est à la pointe de la technologie et est donc entièrement constituée d’avions modernes. Elle est, pour l’heure, la plus puissante au monde. Cette armée est en mesure de déployer 690 Messerschmitt BF-109, 310 Messerschmitt 110 (avions de chasse), 1 360 Dornier DO-17 et Heinkel He-111, 440 Junkers Ju87 Stuka (avions de bombardement) et 700 Dornier DO-17 et Henschel (avions de reconnaissance).

Le rapport d’avions de combat modernes entre la France et l’Allemagne s’établit à 4 contre 1 en faveur de la Luftwaffe. L’écrasante majorité ne fait alors plus aucun doute.

La Marine nationale

Pour défendre son territoire national, mais aussi et surtout pour couvrir l’ensemble de son vaste empire coloniale, l’armée française est obligée de se doter d’une marine puissante et moderne. C’est ce qu’elle fait dès la fin des années 1920. Presque 20 ans plus tard, en 1939 pour être exact, la flotte française, dirigée par l’amiral Darlan, totalise 740 000 t de navires de guerre. Certes, c’est largement inférieur au 1 600 000 t de la marine britannique, mais c’est bien supérieur au 600 000 t de la marine italienne et au 530 000 t de la marine allemande. Ainsi, la France retrouve une puissance maritime qu’elle n’avait plus depuis l’époque de Louis XIV !

Aussi belle que soit cette marine nationale (4 cuirassés, 19 croiseurs, 32 contre-torpilleurs rapides, 26 torpilleurs d’escadre et 64 sous-marins, dont le plus gros du monde, Le Surcouf), elle présente néanmoins de sérieuses déficiences pour la guerre « moderne ». La DCA (défense antiaérienne) est grandement insuffisante et ses équipement de défense anti-sous-marin sont défaillants. Il faut aussi préciser que l’absence de radars sur ses navires de guerre n’est pas d’une grande rareté. En revanche, certains navires (c’est le cas des contre-torpilleurs), figurent parmi les plus rapides du monde. Ces derniers peuvent atteindre une vitesse de 40 à 45 noeuds, soit plus de 80 km/h.

L’armée française à l’aube de la Bataille de France

De cette période, souvent décrite comme véritable fiasco, tout n’est pourtant pas à jeter. Grâce au travail de nombreux historiens, on sait aujourd’hui que la défaite de mai 1940 n’est pas causée par le manque de combativité des soldats français. A ce propos, on peut même dire qu’ils se sont sacrifiés pour le pays.

Fautes militaires ou politiques ?

L’armée française des années 1930 à 1940 connait une évolution certaine. Cependant, elle est nettement inférieure aux ambitions allemandes et aux techniques de la guerre moderne. Le matériel et les équipements sont présents en nombre mais ils sont mal utilisés et non adaptés. Probablement, la France paye son manque de réaction au début des années 1930.

Enfin, politiques et militaires se sont régulièrement renvoyé les responsabilités de la défaite. En réalité, les torts peuvent être légitimement partagés.

Les politiques, aveuglés par Hitler, se sont enlisés dans une politique de paix à l’égard de l’Allemagne et n’investissent que trop tardivement dans l’outil militaire, après l’avoir fortement dégradé au cours des précédentes années.

Le commandement de l’armée à lui considérablement sous-estimé l’ennemi. Certes contraint pour une politique militaire défensive, il ne s’y oppose cependant jamais et s’enferme dans des stratégies désormais dépassées.

L’armée française, sûre d’elle, se repose sur sa gloire et son prestige de la Grande Guerre. Elle est d’ailleurs à ce moment précis, dirigée par ceux qui ont fait la victoire de 1918. A l’aube de la guerre contre l’Allemagne nazie, ce même commandement militaire est dépassé, divisé en interne et déconnecté de toute réalité.

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Sources et références

Comme en 40 - Musée de l'armée
Mai-Juin 1940 : les causes de la défaite - Dominique Lormier
Ils se sont battus - Christophe Dutrône
France 1918-1940-1945
1914-1945 - Nicolas Beaupré
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